Un changement dans l’articulation entre les cours en ligne et le temps passé en ligne avec des mentors chez OpenClassrooms. Du côté de la direction de la jeune pousse, on parle d’adaptation permanente pour améliorer le produit pédagogique.

Alors que l’information ne sera annoncée officiellement aux étudiants que jeudi 30 avril après-midi durant une conférence en ligne, les nouvelles modalités d’utilisation de la plate-forme OpenClassrooms font grincer des dents. Sur le site Change.org, ils sont une centaine des étudiants et des mentors, actuels ou passés à protester sous le titre « stop aux changements abusifs d’OpenClassrooms ».

1500 MENTORS ET 110 SIGNATAIRES

Pour estimer justement l’ampleur de l’opposition, la start-up compte 1500 mentors et du côté de la direction, on assure que la pétition est surtout signés par des élèves. Pierre Dubuc, le CEO et co-fondateur (avec Mathieu Nebra) préfère insister sur le fait que ces changements se sont faits après enquête et consultation. Ce que nuancent les contestataires avec lesquels nous avons pû nous entretenir.

Dans la ligne de mire de ceux-ci figure la nouvelle organisation du mentorat destiné aux étudiants dits autofinancés, autrement dit ceux qui paient eux-même leur formation sans recourir à un organisme public ou para public. Mais, explique le CEO, si les résultats montrent que cette nouvelle organisation est la bonne, elle pourrait être étendue aux autres clients de la jeune pousse.

Pour bien comprendre la situation, il faut rappeler qu’OpenClassrooms propose des cours en ligne. Chacun peut les suivre à son ryhtme. A cela s’ajoute des sessions avec des tuteurs. Jusqu’à aujourd’hui, la session type durait 45 minutes. Elles devraient dans un proche avenir pour les autofinancés être réduites d’un tiers et durer 30 minutes. Entre deux sessions, il y aura d’autres points de contacts, notamment via des webinars destinés à plusieurs étudiants à la fois, explique PIerre Dubuc.

30 EUROS OU UN CHANGEMENT SYMBOLIQUE

Pour les mentors, l’entreprise assure que cela fera une baisse de leur revenu mensuel de 30 euros par étudiant, des revenus qui sont le plus souvent des honoraires, certains mentors étant des travailleurs indépendants avec un statut d’auto-entrepreneur.

Outre la dimension financière, il semblerait qu’il y ait une incompréhension des décisions prises par une direction accusée d’être lointaine par certains des mentors hostiles. La crainte qui revient est celle d’une « ubérisation du mentorat » pour reprendre les termes utilisés par Thomas [le nom a été changé, ndlr], un mentor qui proteste contre l’orientation prise. Et il n’est pas sûr que l’argument des 30 euros perdus par mois et par élève convainquent les plus contestataires. Pour eux, être mentor, ce n’est pas seulement facturer un temps de présence, c’est quasiment assurer une fonction sociale. « On entre dans la vie privée des gens. Il est arrivé qu’on me dise que j’étais la seule personne vue de la semaine » se souvient Thomas.

Alors quand Uber, le nom qui fait peur est lâché, on oscille entre critiques et inquiétudes, plus ou moins rationnelles ou fondées. Ainsi, pour montrer que rien ne va plus chez OpenClassrooms, un mentor affirme que l’un des fondateurs aurait cité Uber comme modèle. Bienvenue chez Radio Moquette, qui comme souvent, se nourrit d’éléments vérifiables. L’arrivée chez OpenClassrooms de cadres de haut niveau passés par Uber semble alimenter les craintes. Les critiques portent alors sur le fait que Monsieur X ou Madame Y n’a jamais donné de cours en ligne et serait en quelque sorte déconnectée de la réalité du métier de formateur et de celui de menteur. Soit le débat classique entre les experts et les gestionnaires, entre l’idéalisme et le principe de réalité.

UNE LEVÉE À 60 MILLIONS D’EUROS

C’est qu’OpenClassrooms n’est pas une start-up comme les autres. Créée par deux amis qui se sont rencontrés adolescents, qui ont « bricolé » sur leur temps libre un site proposant des formations au début du web ouvert, elle s’est peu à peu professionnalisée. Les deux amis sont devenus fondateurs d’une jeune pousse à la visibilité grandissante. Une levée à 60 millions d’euros en 2018 participe de la légende de cette entreprise qui avait fait une entrée triomphante dans l’opinion publique, quand, président de la République impatient d’inverser la courbe du chômage, François Hollande avait annoncé que les demandeurs d’emplois français aurait accès aux services d’OpenClassrooms. De quoi donner du poids à l’ambition des deux fondateurs de rendre la formation « accessible partout pour tout le monde ».

C’est donc une peur que cette mission ne soit plus aussi bien assurée qui semble animer certains des contestataires. De son côté Pierre Dubuc préfère relever les inexactitudes du texte mis en ligne, contestant, par exemple, que les autofinancés n’auront plus qu’une soutenance par mois. Quand on lui demande pourquoi changer les conditions en cours de formation, il précise que « les autofinancés ont un engagement sur un mois. Ils peuvent arrêter à tout moment et d’ailleurs certains le font ». Confiant et stoïque, il rappelle que « ce n’est pas la première fois qu’on adapte, améliore le produit pédagogique. A chaque fois, on le fait pour le mieux ». La protestation actuelle traduirait l’habituelle résistance au changement.

A en croire certains spécialistes de l’éducation en ligne, ce conflit intervient alors que les perspectives sont excellentes pour OpenClassrooms. La situation économique et sociale détériorée devrait lui apporter de nombreux candidats à la formation, qu’ils soient financées par Pôle Emploi ou viennent dépenser en ligne les heures inscrites de leur compte personnel de formation.

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