La violence dans l’Est de la République démocratique du Congo s’intensifie et les craintes d’un conflit plus large dans ce qui est depuis longtemps l’une des régions les plus instables d’Afrique augmentent.

Le président congolais Félix Antoine Tshisekedi accuse son homologue du Rwanda voisin, Paul Kagame, de soutenir un groupe rebelle connu sous le nom de M23. Kagame nie cette allégation et réplique que l’incapacité de Tshisekedi à contrôler les événements dans son propre pays constitue un risque pour la sécurité du Rwanda.

Félix Tshisekedi & Paul Kagame

L’acrimonie a atteint un nouveau sommet fin janvier, lorsque l’armée rwandaise a abattu et endommagé un avion de chasse congolais qui, selon elle, avait violé son espace aérien. Une intensification de la violence ralentirait encore le développement de l’est du Congo, riche en ressources, et exacerberait la pauvreté dans l’un des endroits les plus pauvres du monde.

1. Quel est l’objet des combats ?

Le Rwanda affirme que sa plus grande préoccupation concerne les Forces démocratiques de libération du Rwanda, ou FDLR, l’un des plus de 120 groupes armés actifs dans l’est du Congo. Les FDLR ont été créées par des Hutus du Rwanda ayant des liens avec les auteurs du génocide de 1994 dans leur pays, au cours duquel au moins 850 000 personnes ont trouvé la mort, principalement des Tutsis. Le M23 affirme combattre les FDLR pour protéger les Tutsis congolais victimes de discrimination. L’armée congolaise a parfois travaillé avec les FDLR, dont les rangs ont été décimés au cours de la dernière décennie, pour combattre le M23 et d’autres adversaires. Le Rwanda et les experts des Nations unies affirment que cela se produit à nouveau. L’administration de Tshisekedi affirme que ce qui intéresse réellement le Rwanda, ce sont les abondants minéraux du Congo, et que toute autre question soulevée n’est qu’un écran de fumée. Bien qu’une guerre totale soit considérée comme peu probable, aucune des deux parties ne semble prête à reculer.

2. Que se passe-t-il avec les ressources du Congo ?

Le M23 n’est pas directement impliqué dans le commerce des minerais dans l’est du Congo, mais d’autres groupes armés le sont. Les rapports de l’ONU montrent également que le Rwanda a longtemps profité des richesses naturelles de la région, qui comprennent des forêts et des pâturages. Les États-Unis et l’Union européenne ont classé l’or, l’étain, le tantale et le tungstène du Congo parmi les minéraux de conflit. Cela est censé rendre plus difficile pour les groupes armés de tirer profit de leur commerce. Mais ces efforts ont eu un succès limité. Selon les experts de l’ONU, ces minerais transitent souvent par le Rwanda et l’Ouganda voisin.

3. Qu’en est-il du cobalt et du cuivre ?

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Les approvisionnements n’ont pas été affectés par les combats. Le Congo représente environ 70 % de la production mondiale de cobalt et est le troisième plus grand producteur de cuivre. Ces minerais, des ingrédients cruciaux pour les véhicules électriques et les batteries sont extraits dans le sud-est de la région du Katanga, qui est éloignée des zones de conflit et où la paix règne depuis plus de deux décennies. Le cuivre et le cobalt ne sont pas classés parmi les minéraux de conflit.

4. Quelle est la situation politique ?

Alors que le Congo est près de 90 fois plus grand que le Rwanda et beaucoup plus peuplé, le Rwanda est apparu comme le plus stable politiquement des deux et sa formidable armée a renforcé son influence régionale. Le style de leadership autoritaire de Kagame et son refus d’accepter l’opposition ont toutefois entaché sa réputation et lui ont aliéné un certain nombre de ses pairs. Selon certains experts du Congo, la flambée des tensions pourrait être en partie liée à la crainte du Rwanda de voir l’Ouganda étendre ses intérêts dans l’est du Congo.

Selon les experts de l’ONU, l’Ouganda est depuis longtemps le principal centre de traitement de l’or congolais de contrebande. Ces dernières années, le président Félix Tshisekedi a accueilli dans son pays des entrepreneurs ougandais pour construire des routes commerciales et des troupes ougandaises pour combattre les groupes rebelles, empiétant ainsi sur un territoire où le Rwanda a joué un rôle clé en matière de pouvoir politique.

5. Jusqu’où cela peut-il aller ?

Plus de 521 000 personnes ont été déplacées par les affrontements entre les forces armées congolaises et le M23 au cours de l’année écoulée, selon un rapport de situation de l’ONU du 19 janvier. Le M23 continue d’étendre son contrôle sur des villes clés de l’est du Congo, commettant des massacres et forçant les habitants à fuir, selon les Nations unies, qui ont également impliqué les Forces de défense du Rwanda dans des opérations transfrontalières secrètes. L’ONU, qui dispose de milliers de soldats de maintien de la paix au Congo, s’est jointe aux États-Unis et à d’autres pays pour exprimer sa vive inquiétude face à la détérioration des conditions humanitaires.

Le Kenya et l’Angola ont tenté d’agir comme médiateurs pour mettre fin aux combats. Il n’y a pas eu de guerre à grande échelle dans la région depuis que le Rwanda et l’Ouganda ont envahi le Congo en 1998 après s’être brouillés avec le président de l’époque, Laurent Désiré Kabila. Cette invasion a déclenché un conflit qui a attiré plusieurs autres pays africains et fait des millions de victimes avant qu’un accord de paix ne soit conclu en 2003.

6. Les élections de cette année au Congo pourraient-elles dérailler ?

Les élections présidentielles et parlementaires au Congo sont prévues pour le 20 décembre. Le gouvernement a déclaré qu’il n’y aurait pas de retard, tout en prévenant que le conflit en cours pourrait entraver l’inscription des électeurs dans l’est du pays. Malgré les tentatives de Tshisekedi de rejeter la responsabilité de l’insécurité sur le Rwanda et le M23, d’autres groupes n’ayant aucun lien avec le Rwanda sont responsables d’une grande partie des violences et des bouleversements, et son incapacité à maintenir la stabilité pourrait compromettre ses chances de remporter un second mandat. Le Congo compte plus de personnes déplacées que tout autre pays d’Afrique plus de 5,6 millions principalement en raison du conflit.

Les adversaires de Félix Tshisekedi sont conscients de sa vulnérabilité et ont cherché à faire de la sécurité un thème de campagne.

Par Gédéon Ngango

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