Outre 8 à 10000 missiles Javelin et Stinger, l’armée américaine a fourni 880000 obus de calibre 155 et un lot important de Himars à Kiev, soit les trois quarts de ces munitions aux standards de l’Otan livrées à l’Ukraine par l’ensemble des pays occidentaux, selon les chiffres du Pentagone.
L’armée américaine ne pourra bientôt plus fournir à l’Ukraine les équipements de pointe qu’elle lui a donnés jusqu’ici, ses réserves arrivant à leurs limites notamment en termes de munitions, selon les responsables et des experts américains. Les Etats-Unis sont de loin les premiers donateurs d’armement à l’Ukraine depuis l’opération spéciale de la Russie le 24 février, avec plus de 16,8 milliards d’assistance militaire à Kiev. Mais les stocks américains de certains équipements «atteignent les niveaux minimums nécessaires à la planification et la formation», et le réapprovisionnement des stocks à leur niveau pré-invasion pourrait prendre «plusieurs années», selon Mark Cancian, du Center for strategic and international studies (CSIS).
Des équipements plus anciens sont disponibles et «ils représenteront une part de plus en plus importante des transferts» à l’avenir, ajoutait dans une note récente cet ancien colonel du corps des Marines qui fut responsable des achats d’armement du Pentagone de 2008 à 2015. «Nous sommes en train de tirer des leçons» sur les besoins en munitions de l’armée américaine dans un conflit entre grandes puissances, qui sont «bien supérieurs» aux prévisions, a reconnu un militaire américain sous le couvert de l’anonymat.
L’industrie américaine de défense, qui a été forcée de réduire sa production de façon drastique dans les années 1990, lorsque les Etats-Unis ont voulu récolter les bénéfices de la paix après l’effondrement de l’URSS, s’est ultra-concentrée pour amortir le choc.
Le nombre de groupes de défense et de construction aéronautique est passé de 51 à 5 en quelques années. Aujourd’hui, le gouvernement américain doit convaincre l’industrie de rouvrir des chaînes de montage et de relancer des productions qui avaient été abandonnées, comme celle des missiles antiaériens Stinger, dont la production a cessé en 2020.
Certains de ces équipements sont devenus emblématiques de la guerre en Ukraine, comme le Javelin, l’arme antichar largement utilisée par les forces ukrainiennes au début du conflit pour faire reculer une colonne de chars russes qui tentait d’entrer dans Kiev, ou encore le Himars, lance-roquettes monté sur des blindés légers, qui joue un rôle important dans les contre-offensives ukrainiennes dans l’est et le sud du pays.
Les stocks américains de munitions nécessaires aux Himars, des roquettes guidées par GPS dites GMLERS, d’une portée de plus de 80 km, sont toutefois limités, selon M.Cancian. «Si les Etats-Unis ont livré à l’Ukraine un tiers de leur inventaire de GMLERS, comme ils l’ont fait pour les Javelin et les Stinger, l’Ukraine en a reçu entre 8000 et 10000», un nombre suffisant pour «quelques mois», explique l’expert du CSIS. Or, Lockheed Martin ne produit actuellement que 5000 de ces roquettes de haute précision par an, et même si le gouvernement américain a débloqué des fonds pour accélérer cette production, les Etats-Unis mettront plusieurs années à reconstituer leurs stocks, ajoute-t-il.
Washington a livré à Kiev quelque 8500 missiles pour Javelin, mais la production annuelle de cet armement symbole de la résistance ukrainienne n’est que de 1000 missiles.
Les Etats-Unis en ont commandé en mai pour 350 millions de dollars à la société commune entre Raytheon et Lockheed Martin qui les fabrique, mais là encore, il faudra plusieurs années avant que les stocks américains ne soient reconstitués. L’armée américaine a fourni 880000 obus de calibre 155 à Kiev, soit les trois quarts de ces munitions aux standards de l’Otan livrées à l’Ukraine par l’ensemble des pays occidentaux, selon les chiffres du Pentagone.
«C’est probablement proche de la limite de ce que les Etats-Unis sont prêts à donner sans risque pour leurs propres capacités de défense», selon M.Cancian.
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