• Serait-ce l’un de ses «avocats», entendez Maîtres Christophe Lutundula, Georges Kapiamba, Delly Sessanga ou Francis Kalombo ?

Pour avoir juré «sur l’honneur que les renseignements» fournis lors du dépôt de ses candidatures en qualité successivement de député national, de député provincial et de gouverneur de province «sont sincères et exacts», l’homme a menti délibérément et met lui-même fin à sa carrière politique…

C’est l’affaire la plus gênante qui soit à ce moment précis pour tout le monde. Avoir détenu la double nationalité pendant la période où il a exercé les fonctions de gouverneur de province du Katanga après avoir été élu successivement meilleur député national et meilleur député provincial, Moïse Katumbi s’est compliqué lui-même la vie. Il savait tout de même la nationalité congolaise une et indivisible d’autant plus que la Constitution – dont il se fait le défenseur attitré quand il s’agit de rappeler le nombre de mandat pour le Président de la République – déclare clairement aux alinéas 1 et 2 de son article 10 : «La nationalité congolaise est une et exclusive. Elle ne peut être détenue concurremment avec aucune autre». «Jeune Afrique» rapporte dans sa livraison du 22 mars 2018, mise en ligne à 19h08, qu’elle a été consultée par la mairie de San Vito dei Normanni. La municipalité «confirme que l’opposant – qui a choisi le nom de Moïse Katumbi d’Agnano lors de sa demande de naturalisation – a acquis la nationalité italienne le 3 octobre 2000, avant d’y renoncer le 13 janvier 2017». Ainsi, 17 ans durant, Katumbi se savait à la fois italien et congolais…

Quoi de plus normal alors que de voir le Procureur Général de la République ouvrir une information judiciaire le 27 mars 2018 «à charge de Moïse Katumbi pour que le moment venu, il puisse répondre de tous ces actes», a relevé à l’intention de la presse Flory Kabange Numbi, avant de se demander «Comment voulez-vous qu’un individu se sachant de nationalité italienne puisse se présenter devant nos bureaux pour avoir le passeport, la carte d’électeur». Et de trancher : «Tout ce temps qu’il a passé à la tête de la province, il se prévalait des actes faux, de faux documents».

Autant dire d’emblée que l’affaire «Stoupis», pour laquelle il a été condamné, devient banale, comparée à celle de la nationalité. Par contre l’affaire des mercenaires prend, elle, une dimension tellement grave que même la Cenco doit se sentir gênée de rappeler à la mémoire collective son rapport de déculpabilisation publié en 2017.

A dire vrai, cette affaire de nationalité met Katumbi face à Katumbi !

Et pour cause !

C’est vraiment une affaire katumbi-katumbienne

Une précision s’impose à ce stade : en 2000, lorsqu’il avait sollicité la nationalité italienne, l’homme n’exerçait aucune activité politique. Le Pprd avait été créé en 2002, en pleins travaux du Dialogue intercongolais à l’étape de Sun City I. Moïse Katumbi a rejoint ce parti en 2005, en prévision d’ailleurs des élections présidentielle, législatives et provinciales organisées entre juillet et octobre 2006.

Il est évident que chaque candidat savait ce qu’il était par rapport à sa nationalité. Aucun parti, aucun regroupement ne pouvait savoir qui était congolais, qui ne l’était pas, qui était à la fois congolais et étranger.

Lorsqu’il avait déposé son dossier de candidature pour la députation nationale, pour la députation provinciale et pour le gouvernorat de province, Moïse Katumbi n’ignorait rien des dispositions de la Loi n° 06/006 du 09 mars 2006 portant organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales, précisément en ce qui concerne les législatives (articles 120-121), les provinciales (articles 148-149) et les «gouvernorales» (articles 161-162).

Toutes ces dispositions astreignaient tout candidat à l’une ou l’autre de ces échéances à «Etre de nationalité congolaise» (qui est une et indivisible), à «jouir de la plénitude de ses droits civils et politiques» et à présenter «une fiche d’identité suivie d’un curriculum vitae détaillé», le tout se terminant par la formule «‘Je jure sur l’honneur que les renseignements ci-dessus sont sincères et exacts’».

Moïse Katumbi Chapwe avait, par trois fois, fait la navette entre son domicile ou son bureau et le siège provincial de la Ceni au Katanga tout en ayant conscience de fournir, lui-même, à la CEI des renseignements qu’il savait faux !

Personne de sensé, dès lors, ne peut tenir Joseph Kabila pour responsable de cette bavure. Le faire revient à engager aussi la responsabilité de Pierre Lumbi en sa qualité de conseiller spécial du Chef de l’Etat en matière de sécurité.

En vérité, c’est une affaire «katumbi-katumbienne» dans laquelle le moratoire proposé par Vital Kamerhe en 2007, à l’initiative de José Makila pour les acteurs institutionnels détenteurs de la double nationalité, n’a rien à voir avec l’affaire en cours. Même si ce moratoire n’a jamais été levé, ce n’est pas une raison pour le candidat de fournir de faux renseignements…

Entré par effraction, il en sort par infraction !

Reste maintenant à savoir qui a refilé à Moïse Katumbi l’idée d’écrire officiellement en 2017 aux autorités italiennes pour renoncer à la nationalité obtenue en 2000, soit dix-sept ans plus tôt. L’aurait-il fait en 2006 au moment de l’enregistrement des candidatures pour les législatives qu’il serait vite excusé.

Mais, il a attendu 2017, et encore après avoir annoncé en 2015 sa candidature à la présidentielle.

De deux choses alors l’une : Moïse Katumbi a soit été conseillé par un proche pouvant être un juriste de formation ou de profession, soit il s’est auto-conseillé.

Dans la première éventualité, on pourrait bien penser à Christophe Lutundula, Georges Kapiamba, Delly Sessanga ou Francis Kalombo. S’il s’agit de l’un d’eux, il revient par de conséquence au «bon conseilleur» de payer ! Dans la seconde éventualité, Moïse Katumbi aura confirmé, si besoin est, qu’il n’a aucun sens d’Etat.

Au-delà toutefois des suppositions, l’évidence est que si cette affaire de nationalité italienne est vraie, l’ancien et dernier gouverneur du Katanga aura ruiné pour longtemps sa carrière politique. Au demeurant, la politique n’a jamais été son dada, avait-il déclaré par le passé. Le sien est dans le monde des affaires.

Entré donc par effraction, il en sort par infraction !

© Wab-infos avec Congo30juin


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