Vidiye Tshimanga, a déposé plainte en RDC et le parquet envisage de lancer des commissions rogatoires auprès de la justice britannique dans l’espoir d’identifier le responsable de la conspiration.
Dan Gertler est soupçonné d’avoir recouru aux services de Black Cube dans un autre dossier judiciaire, de même que Joseph Kabila, pour infiltrer l’opposition en 2015. Ce que le milliardaire dément formellement par la voie de Carter-Ruck : « Notre client n’a à aucun moment utilisé ou donné d’instructions à Black Cube, que ce soit directement ou indirectement (…) ». Contactée, la société Black Cube dit « n’avoir jamais travaillé » avec Dan Gertler ou Joseph Kabila.

Étrangement, un ancien membre du board de Black Cube, Kirill Parinov, possédant la double nationalité russe et israélienne, a disposé de trois sociétés domiciliées à Kinshasa. L’une d’entre elles s’appelle Riverside Development et indique au registre de commerce congolais un point de contact également utilisé par sa société pétrolière Caprikat ou encore par Woodhaven DRC SASU et Ashdale Settlement Gerco. Ces deux dernières sont considérées par le département du Trésor américain comme des « sociétés-écrans » de Dan Gertler. Elles sont placées depuis décembre 2021 sous sanctions. Interrogé précisément à ce sujet, le cabinet d’avocat britannique précise que son client « ne connaît pas M. Parinov (…) et qu’à sa connaissance, il n’a eu aucune relation avec lui ».
La source proche a révélé que l’exécutant du piège qui a précipité la chute du conseiller du chef de l’Etat, Vidiye Tshimanga, avait auparavant tenté d’approcher le ministre des hydrocarbures, Didier Budimbu. Plusieurs hommes d’affaires ont également été ciblés. Tous ont en commun d’avoir eu maille à partir avec le milliardaire israélien Dan Gertler. Le mal de s’être entouré des voleurs et les repris de la Justice. ..
Il continue d’imposer un mauvais polar au sommet de l’Etat congolais. Même si le magnat israélien des mines Dan Gertler ne maîtrise plus tout à fait le récit, comme du temps de la présidence de Joseph Kabila (2001-2019). Depuis l’arrivée de Félix Tshisekedi l’homme d’affaires israélien n’est plus au cœur du pouvoir et doit se battre pour ne pas tout perdre. Acculé, il a été contraint de signer en février 2022 un accord avec l’Etat congolais qui prévoit la restitution de ses actifs pétroliers et miniers en échange, notamment, de l’abandon des poursuites judiciaires contre lui. Pas de quoi satisfaire le département du Trésor américain, qui l’a placé sous sanctions dès décembre 2017 pour « corruption ».
« Jeu » dangereux
Sous étroite surveillance, Dan Gertler n’a toutefois pas cessé d’exercer son influence au sein du pouvoir de Tshisekedi. Ces derniers mois, le milliardaire a dépêché des émissaires en série à Kinshasa, s’est entretenu secrètement avec le chef de l’Etat, a multiplié les contacts avec certains de ses conseillers et ministres. Comme pour tenter par tous les moyens d’écrire un pan des derniers chapitres d’une intrigue qui semble désormais lui échapper. Ceux qui résistent à cette offensive sont explicitement ciblés.
Comme en ce début de mois d’avril 2022 dans un SMS adressé à Vidiye Tshimanga, le conseiller du président chargé des affaires stratégiques : « Je te donne un très bon conseil, frère. Reste loin de tout ça tant que tu le peux. » Gertler pianote frénétiquement sur son smartphone : « Je n’apprécie pas tes soupçons, poursuit-il. J’entends de plus en plus ton nom (…). Ce n’est pas bon à mon avis. » Puis, il lance un appel vidéo.
Vidye Tshimanga décroche. Visage austère mangé par une barbe épaisse, l’homme d’affaires lâche : « Tu joues avec ta réputation. »
A l’origine de ce coup de sang : un conflit entre Dan Gertler et celui qui fut son avocat congolais depuis 2018, Roger Masamba. Ce dernier reproche à son ancien client de ne pas lui avoir reversé les honoraires prévus pour le traitement de litiges avec Kamoto Copper Co (KCC) et Mutanda Mining, deux filiales du trader suisse Glencore un temps suspecté de verser des millions d’euros à une société contrôlée par Dan Gertler. Une brouille en apparence banale qui contraste avec les montants réclamés par Me Masamba, selon l’avocat : entre 25 à 30 % des 3 milliards de dollars réclamés par les sociétés de Dan Gertler à Glencore.
Informé de ce différend, Vidiye Tshimanga s’inquiète des pressions exercées sur l’avocat et rédige une note à l’attention du président Félix Tshisekedi. Sauf que Dan Gertler compte de nombreux relais au sommet du pouvoir congolais et ne tarde pas à l’apprendre. Les mises en garde laissent place à des menaces directes. Pour sa part, Me Masamba s’est retrouvé dans le viseur du Conseil national de l’ordre des avocats et d’une frange des conseillers du président réputé favorable aux intérêts de Dan Gertler.
Un dossier risqué
Homme d’affaires, actif notamment dans les mines via sa société Cobamines, Vidiye Tshimanga est l’un des proches de Félix Tshisekedi , dont il a financé la campagne en 2018. Une fois l’élection remportée, le voilà nommé conseiller spécial du nouveau président.
Washington soutient alors ardemment la lutte anti-corruption utilisée pour anéantir l’influence économique et sécuritaire persistante de l’ancien président Kabila. Pour satisfaire son partenaire américain, Tshisekedi déclare publiquement vouloir « déboulonner » le système de son prédécesseur qui a permis l’enrichissement considérable de celui qu’il appelle affectueusement « Monsieur Dan ».
Par Gédéon Ngango
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